mardi 21 juillet 2009

L'avalé

J'ai ouvert un livre qui commençait comme ça : Tout m'avale. Un livre que je n'ai jamais fini. Et qui a disparu de ma collection. Comme si le destin ne voulait pas que je sache ce qu'il est advenu de Bérénice et de son frère Christian. Ou comme si, inconsciemment, je ne voulais pas lire ce livre. Comme si je ne voulais pas m'imprégner de cette lourdeur poétique. Comme si je n'étais pas prêt aux mots de Ducharme. Comme si dans le fond, c'était moi, l'avalé des avalés.

Au premier chapitre, j'ai été émerveillé par les mots. Les images. Les phrases. Tout, quoi. Au deuxième chapitre aussi. C'est au vingtième que j'ai reposé le livre. Pour ne jamais le ré-ouvrir. Et pour oublier son existence. Jusqu'au matin où je me suis levé en me disant : Tout va mal. Tout m'avale. Comme Marie-Sissi disait dans son livre.

Alors, j'ai perdu l'essence de Ducharme. J'ai oublié les évocations de l'île. Ou de la péninsule. Des flammes. De l'arbre.

C'est drôle comme ces souvenirs fictifs me semblent vrais. D'une certaine manière, je les ais vécus. Mais aujourd'hui, j'ai des images de la maison de Bérénice. Et de son arbre. Son bateau. Son échappatoire. Et moi, l'échappatoire, c'était le cadavre d'un arbre. Effiloché et cousu en papier. Tatoué de langage. Et vendu en plusieurs exemplaires impersonnels.

Et du jour au lendemain, j'ai commencé à me faire avaler par les mots. Les mots de l'avalée des avalés. Par la dactylo de Ducharme. Et j'ai perdu pied.

Tempus Fugit

J'ai réglé mon pas sur l'horloge du corridor. Mon AM est devenu mon PM et vice-versa. Et à chaque fois que je me réveille, je cogne un clou de plus dans le cercueil de ma vie sociale.

C'est idiot.

De toute façon, j'ai perdu mon marteau. J'ai les paumes ensanglantées, percées. En écoutant du Björk. Pas assez de Björk. Pas assez de Metric. Trop de silence. Et de TQS. Et de TVA.

C'est vide.

Dans ma tête. Dans ma vie. Mais pas mon coeur. Qui est trop plein. Beaucoup trop plein. Plein de toi qui est vide de moi. Et non avide.

C'est rouge.

Dans mon univers. Changer mon rideau. Une solution? Ou m'investir à temps plein dans une redéfinition des couleurs de l'intimité. Avec du Lynda Lemay comme fond sonore.

C'est possible.

D'être heureux pareil. Même quand on se vampirise. Le soleil qui brûle mon sommeil. Mon sommeil qui s'éteint aux levers de lune.

C'est mélancolique.

J'irai planter une mandragore pour moi, un oeillet pour ma vie sociale et un bouquet de roses rouge pour toi. Je me planterai sans doute une tonne d'épines. Dans la main. Volontairement. Un peu plus de sang, ça change quoi?

C'est redondant.

Le tic-tac du corridor. AM est PM et PM est AM. Comme tantôt. Excepté que mon sommeil a peur du soleil. Aujourd'hui.
Je vais aller photoshopper mon âme. Ça lui fera du bien.

mercredi 8 juillet 2009

La porte

Devant moi, la porte.

Elle a sûrement toujours été là. Mais je n'ai jamais été tenté de l'ouvrir. Jusqu'à aujourd'hui. Comme si elle m'appelait, subitement.

Ouvre-là. Ouvre-là. Ouvre-là.

L'ennui, c'est que je ne sais pas où elle mène. Ailleurs, sans doute. Mais je ne veux pas l'ouvrir. Enfin, je ne DOIS pas l'ouvrir. Je crois. Personne ne m'en a jamais parlé.

Allez, ouvre-là. Maintenant.

Je n'ai aucune idée de l'endroit d'où je suis depuis trop longtemps. Combien de temps déjà? Deux minutes? Deux heures? Toute une vie?

Il est trop tard pour reculer. Tu l'as vue.

Devant moi, la porte. Qui me supplie de l'ouvrir. La lumière blanche qui s'échappe de sa vieille serrure m'envoûte, me tente, me déchire de l'intérieur.

Libère la lumière. Arrache la porte de ses gonds, s'il le faut.

Et si mon coeur s'arrêtait, devant la source de cette lumière? Et si je me retrouvais au bout du monde? Et si...

La main sur la poignée, je respire profondément. Le coeur dans la gorge jusqu'aux chevilles, je repousse un peu plus le moment. Je bats au rythme de mon sang circulant à une vive allure. Et je tourne la poignée.

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